Je danse seule – Laure Samama

Laure Samama Je danse seule Bizalion 5ruedu.fr chronique livre photo
17 Mars 2020, subitement la France se trouve à l’arrêt. Un peu comme si la Terre avait cessé de tourner, le monde se retrouve figé, confiné.

On conseille à Laure Samama de s’enfermer avec ses proches. Mais voilà, elle n’a pas assez de proches. Alors, elle s’enferme seule.

De cette expérience naît un surprenant livre, paru dans la collection Notes, chez Arnaud Bizalion Editeur :  Je danse seule.

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©Laure Samama

Je danse seule n’est pas qu’un livre de photo, mais il n’est pas non plus seulement une autobiographie. C’est un objet hybride, texte et photo – photo et texte, où Laure Samama se livre, se raconte ; où l’image et les mots sont en relation permanente.

Cette structure, déjà employée dans son premier ouvrage Ce qu’on appelle aimer (Arnaud Bizalion éditeur, collection Notes,) qui pourrait être le tome 1, offre au lecteur l’opportunité de comprendre l’intimité entre écrit et image.

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©Laure Samama

Au début, il y a une forme de sidération. On reste là, bras ballants, ne sachant trop quoi faire de ces longues heures, de ce temps élastique. On dort. On dort et on se lève quand il faudrait se coucher. On suit des séries, encore des séries, puis des infos contradictoires et effrayantes, puis rien. On mange, on n’a pas faim et heureusement la gardienne de l’immeuble, attentive, nous nourrit.

La réalité reprend un peu forme, même si pas grand-chose n’a de sens. Les amies envoient des photos agaçantes. On coupe les ponts.

Et il y a ce jour où, sur Facebook, Laure publie un long texte qui résume bien ce que peuvent ressentir des milliers d’anonymes: « Ne me demandez pas d’être forte […]je me donne le droit d’être atterrée. »

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©Laure Samama
C’est le moment où la photographie prend peu à peu sa place dans le livre. Comme si, une fois la sidération initiale passée, les mots ne suffisant plus, il avait fallu utiliser l’autre médium. Une forme, peut-être, de « normalité » dans un quotidien qui ne l’est pas.
Portable, numérique, la réalité (comme dans Ce que j’appelle aimer) dans ce qu’elle a de plus vraie, crue. Laure photographie ce qu’elle s’était jurée de ne pas photographier. Laure photographie les murs et le ciel. Laure photographie jour et nuit.
Parce qu’au fond il n’y a plus que ça.
Laure Samama Je danse seule Bizalion 5ruedu.fr chronique livre photo
©Laure Samama

Le livre de Laure Samama a quelque chose de profondément bouleversant.

D’abord parce que le choix de croiser écriture et photographie lui donne une profondeur particulière. Ici, les mots ne sont pas plus forts que les clichés et vice-versa. Chacun accompagne l’autre, le soutien dans un équilibre qui pousse le lecteur à s’avancer plus loin dans l’ouvrage.

Ensuite, parce que ce que révèle la photographe d’elle est certainement bien plus proche de la réalité des millions de français confinés que les émissions, chaînes YouTube et autres tutos invitant à cuisiner, faire du sport sans baskets et ranger ses cuillères dans une sorte de gaieté feinte et comminatoire.

On s’ennuyait copieusement, asservis par le télétravail, on avait peur, même d’aller chercher une baguette de pain, et on n’attendait plus qu’une chose : que cela cesse enfin pour pouvoir danser à deux.

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©Laure Samama

Laure Samama a su composer avec la réflexion personnelle, intime, et la dimension collective. On sait d’elle ce qu’elle ressent alors qu’elle nous le livre en toute franchise (et avec une très agréable distance ironique), mais il y a aussi la profondeur nécessaire dans le rapport à Soi, aux Autres, aspect cette fois beaucoup plus universel et réflexif de cette « aventure ».

Par conséquent, si un ouvrage devait prétendre à servir d’exemple de ce que furent ces 55 jours, de comment ils furent vécus, Je danse seule serait très certainement en tête de liste.

Site de Laure Samama

Site de Arnaud Bizalion Editeur

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Frédéric MARTIN
Frédéric MARTIN

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