De Robert Louis Stevenson on connaît, en général, Voyage avec un âne dans les Cévennes ou L’île au trésor. Pourtant, l’écrivain écossais a navigué sur la Sambre et l’Oise de Anvers à Pontoise à la fin du XIXème siècle. Un ouvrage, An Inland Voyage, moins connu, est paru en 1878 à la suite de cette navigation.

Quentin Pruvost a décidé de marcher dans les pas de l’auteur, en canoë aussi, et de ces détours est né Inland Voyage paru aux éditions LightMotiv.

©Quentin Pruvost

D’abord, il y a la végétation : dense, touffue, aux faux airs de forêt tropicale.

Puis l’eau omniprésente. On devine parfois un oiseau, héron ou cormoran, des arbres en fleur, des courants qui vont s’accélérant. Un orvet serpente dans les herbes.

Tout est calme.

Parfois surgissent des traces de vies humaines : un pêcheur, une usine, un pont d’acier sur lequel courent des rails.

Et puis, il y a de temps en temps des Hommes, mais comme des ponctuations, des surgissements. C’est une jeune fille en tenue de majorette, presque une fée ; c’est un homme et son chat qu’on imaginerait en magicien ; c’est un couple enlacé, des amants retrouvés.

©Quentin Pruvost

Inland Voyage est un livre somptueux à la magnifique maquette. Construit autour de photographies couleurs et d’un cahier central aux images noir et blanc argentées, c’est une vraie réussite graphique.

Mais c’est surtout un ouvrage de magie et d’enfance. Le prétexte de suivre les « pas » de Stevenson est aussi celui d’une forme de retour en arrière, quand nous étions plus jeunes, explorateurs courageux de lieux à découvrir, d’espaces à coloniser, de vies à inventer.

On devient avec Quentin Pruvost d’audacieux Robinson, d’intrépides aventuriers à la découverte d’un Nouveau Monde. Qui n’a pas rêvé ainsi, enfant, de passer des heures aux fil de l’eau ? Qui n’a pas eu envie de s’affranchir du monde des grands et de partir là où nous serions seuls ?

(A ce propos on visionnera avec bonheur Les Géants de Bouli Lanners écho magnifique, lui aussi, au livre de Quentin.)

©Quentin Pruvost

Mais on ne peut limiter Inland Voyage à une simple recension de navigations. Il y a de la magie dans ce livre, aussi.. Magie des contes, avec ses sorciers, ses elfes, ses druides. Les personnes croisées, photographiées par Quentin Pruvost semblent hors du temps même si elles sont dans l’époque. Cette relation, ce lien, laisse penser que la rencontre a finalement un peu un parfum de sorcellerie.

Et puis, les traces humaines sont ici comme des vestiges, ceux d’un monde presqu’englouti par la luxuriance du végétal. Les éditions LightMotiv s’attachent, par leurs ouvrages, à montrer l’interaction ente l’Homme et la Nature : ici c’est peut-être moins une relation franche, directe, plutôt qu’une hypothèse où l’être humain serait finalement en retrait par rapport aux espaces naturels.

©Quentin Pruvost