Héroïnes 17 – Anaïs Oudart

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©Anaïs Oudart

Lauréate de la quatrième édition du Prix Caritas Photo Sociale, Anaïs Oudart nous offre avec Héroïnes 17 paru chez Filigranes Éditions un ouvrage aussi incisif que touchant. Dans celui-ci, la photographe nous propose des images de jeunes femmes âgées de dix-huit à vingt-sept ans ainsi que des natures mortes, des photos de lieux empreintes de mélancolie et de gravité. Par ailleurs, des textes, fragments d’entretiens, évoquent le passé et l’avenir des femmes photographiées.

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Dix-sept ans… C’est l’âge où, selon le poète, l’on n’est pas sérieux. Pourtant, pour les héroïnes du livre c’est avant tout un âge charnière. Un âge où malheureusement elles doivent envisager leur avenir avec le plus grand des sérieux. En effet, elles qui sont placées en foyers, familles d’accueil ou centre d’hébergement doivent préparer dans l’année qui précède leur majorité la sortie de ceux-ci. La majorité les condamne à devoir quitter ces lieux qui sont bien souvent leurs uniques refuges. Il y a l’angoisse du futur, la pesanteur du passé…

Anaïs Oudart nous invite alors dans le cheminement de ces existences fragmentées.

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Elle est là fière, posant debout sur un billot de bois pour donner encore plus de majesté à celle qu’elle a déjà. Par quoi est-elle passée avant ? Nous n’avons que des bribes anonymes, des morceaux d’existences détruites par la violence, la prostitution, l’exil ou la fuite. Mais voilà, elles se sont reconstruites, peu à peu, patiemment ou elles sont entrain de le faire. Alors elles offrent à la photographe la fragilité et la puissance, la douceur et les tourments. C’est Ophélia en robe les yeux clos avec l’eau qui la baigne, c’est une main gantée tenant une clé, une pastèque éclatée au sol comme la violence faîte aux corps ; une femme teinte en blond, dans la pénombre, le regard lointain ; un nounours face contre terre ; une femme et un chat dans une chambre aux murs vides.

Il faudrait toutes les décrire, décrire chacune des images tant les photographies qui composent Héroïnes 17 vont bien au-delà du simple reportage ou de l’hommage.

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© Anaïs Oudart

Quand on lit les témoignages, qu’on prend conscience de l’horreur qui a composé leurs existences et paradoxalement de la foi qui les anime, de cette envie d’avenir, force est de constater que la mise en image magnifie leurs personnes.
Il y a ici plus que de la beauté et pourtant la beauté est présente en chacune des pages. Parce qu’il n’est pas suffisant de dire que les photographies sont belles, que les modèles sont belles. Ce serait non seulement réducteur, mais aussi une limite au propos. Elles ont eu les dix-sept ans fatidiques et ont dû encore une fois craindre pour leur avenir, choisir une voie pour demain.

Elles ont fui leurs familles pour certaines, ont été éloignées pour d’autres et à peine ont-elles eu le temps de trouver un peu d’équilibre, un soupçon de quiétude dans leurs vies chaotiques que voilà déjà le moment de choisir, de décider, de se projeter… Alors derrière les larmes, par-delà les murs de la cité, on se tourne vers l’apprentissage, on décide de faire des études qui permettront d’aider les autres, on monte des associations.
La force de vie incroyable qui anime ces femmes, cette volonté de s’en sortir, jaillit à chacune des photographies. Bien sûr, nous lisons dans les images les doutes et les désespoirs, les peurs aussi, les choix contraints. Mais pourtant page après page, Anaïs Oudart va plus loin, et l’on sent bien le lien plus intime et subtil qui a pu se créer entre elle et ses modèles.

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© Anaïs Oudart

Héroïnes 17 est un travail remarquable, un travail de lutte et de sororité. Certes, il nous invite à prendre conscience d’abord des vies catastrophiques de certaines, si toutefois nous n’en avions pas idée. Mais surtout très loin de se complaire dans un dolorisme tragique, il offre un message d’espoir. Il faut se battre, il faut aider et soutenir (et ça passe aussi par la photographie), il faut offrir un demain à celles qui n’ont pas vraiment eu d’hier.

Pour suivre le travail d’Anaïs Oudart

Pour retrouver le livre sur le site des éditions Filigranes

25€

Exposition de la lauréate et des finalistes du Prix Caritas Photo Sociale 2023 du 17 janvier au 2 mars 2024.
Vernissage le vendredi 19 janvier à 19h.
Mairie du 10e arrondissement de Paris
72, rue du Faubourg Saint-Martin
75010 Paris

Collection Hors Collection

Format 210 x 300

Broché

40 photographies en couleurs

72 pages

ISBN : 978-2-35046-615-6

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Frédéric MARTIN
Frédéric MARTIN

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