Oostende – Yvon Lambert
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| ©Yvon Lambert |
Conversations du bord de mer – Oostende- par Yvon Lambert publié chez ARP2 Publishing est de ces livres qu’on parcourt quand les envies d’un ailleurs, d’un voyage qui ne soit pas lointain mais dépaysant nous saisissent.
Fruit de plusieurs années de prises de vues dans la cité balnéaire flamande, c’est un ouvrage délicat, plein d’une lenteur surannée.
Ils sont là les touristes, les estivants dans cette ville au passé royal et glorieux.
Ils sautent dans les vagues froides de la Mer du Nord, ramassent des crevettes et contemplent l’eau.
Plus loin des boutiques aux charmes anciens, vendant de tout et n’importe quoi, mais Made In China, sont offertes à celui ou celles qui voudra bien d’elles.
La mer déroule ses rouleaux, empile son ressac. On mange quelques fruits sous l’œil scrutateur d’un goéland, on boit un café et les barres d’immeubles du front de mer défigurent un paysage avant d’en créer un autre.
Arno chantait : « On s’proméne comme tous les soirs/On va de bar en bar » et c’est bientôt la nuit dans les images d’Yvon Lambert. On danse, on chante, on boit mais la fête semble un peu mélancolique.
Demain on s’aimera sur le port ou dans le hall d’un immeuble.
Oostende est éternelle, mais vieillie.
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| ©Yvon Lambert |
Le travail photographique d’Yvon Lambert pourrait se passer de commentaire, d’explication tant il relève plus de l’état mental que de la documentation du lieu.
Parce que qu’est-ce que nous dit Conversations du bord de mer – Oostende- ?
Rien d’autre que ce qui est : une ville qui fût, une ville qui est ou n’est plus ou devient.
Parcourir les rues d’Oostende, ses quartiers, son immense plage, avec le photographe, c’est accepter de prendre son temps, accepter de voyager dans la lenteur et dans le passé.
Mais, si l’on parle ici de passé, on ne parle pas de passéisme, la nuance est de taille.
Bien sûr, la ville n’a plus la gloire et l’aura qu’elle eu autrefois, et sous les vestiges de l’apparat elle est devenue un territoire populaire. Sauf que la mélancolie, une forme de fragilité ténue sourde à chacune des pages.
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| ©Yvon Lambert |
En fin de compte, le photographe ne nous parle pas ici d’autre chose que de lui. Mais avec la politesse et la décence requises : les image délicates et sensibles (on est très loin du cirque extravagant de Martin Parr) forment une distance qui respecte le sujet.
Finalement, on peut se demander si parcourir Oostende dans les pas d’Yvon Lambert ce n’est pas prendre son temps, comprendre l’importance de la flânerie et de la déambulation. Il y a toujours à voir, même s’il n’y a rien, même si le futile, le banal et le quotidien exsudent de chacune des images.
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| ©Yvon Lambert |
La beauté poétique de Conversations du bord de mer – Oostende- tient justement dans ce rien ou ce si peu, qui pourtant est tout. Yvon Lambert a su, par cet ouvrage, nous amener avec lui dans des recoins, des instants singuliers par leur absence de singularité.
« La poésie du banal » est un poncif, qu’on ressort quand on n’a pas grand-chose à dire, pourtant, parfois, une pépite émerge qui donne son sens plein et entier au cliché. Oui les photographies d’Yvon Lambert sont banales et immensément poétiques, oui elles parlent de choses triviales et possiblement sans âmes mais portent en elle une force qui les transcende. Il n’y a rien d’aussi beau que ce qui ne l’est d’ordinaire pas, c’est peut-être la plus grande force de ce livre et du travail d’Yvon Lambert.
Merci à lui d’avoir réuni et réussi cette jonction, de nous amener à voir autrement ce que nous ne voyons plus.
37€
